11/02/2012
Passé sous silence
Public lycéen/une conférence-spectacle en trois reprises de treize minutes
Technicien du son, pédagogue, compositeur, metteur en scène, homme d’habituelle discrétion, Didier Beauvalet sort de sa réserve pour nous proposer “passé sous silence”. Un silence qui pour l’heure vaut avis de tempête. Car il s’agit de hausser le ton face aux dérives sonores dont les jeunes générations sont les victimes désignées.
Sans esquiver que la violence sonore fait partie d’une expérimentation du risque propre aux rites de passages juvéniles, “passé sous silence” explore une voie nouvelle dans la médiation avec les publics adolescents. Dans la continuité du travail institutionnel de prévention mené depuis ces dernières années, ce spectacle, sans développer de discours insistant, place les ressorts de la sensibilité et de l’imaginaire comme forces du propos.
Seul en scène, dans une scénographie habilement étudiée pour les salles des collèges et lycées, Didier Beauvalet nous entraîne dans une joute onirique, convoquant les héros mythologiques Orphée et Ulysse, l’œuvre au noir du peintre Goya, la poésie lumineuse de Keats...Et puis il y a Marthe, Romain, Jérémie et les autres, ces très jeunes adultes confrontés quotidiennement aux effets gravement invalidants de l’hyperacousie et des acouphènes. Présences saisissantes au détour d’un visage, d’un écrit, d’un témoignage.
Mais le spectacle est également une remarquable éducation à l’écoute : enflements des sons du quotidien, polyphonies acouphéniques, superpositions vocales, effleurements, caresses auditives et chuchotements. Nous nous surprenons à tendre l’oreille pour accéder à la palette des nuances perceptives, saisir la richesse sonore qui nous entoure, mais que nos comportements menacent d’irrémédiablement nous soustraire.
“Passé sous silence” allie efficacité et légèreté pour aborder une réalité poignante et nous offre une plongée étourdissante dans le monde des atteintes auditives d’origine traumatique.
Et tout cela est fort bien dit, sans compassion, sans catastrophisme, avec beaucoup de punch et d’élégance.
Sylvie Naulot
Photographie : Didier Delange
19:26 | Lien permanent | Commentaires (0)
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